-Aah, je vais être en retard.

Le jeune homme courrait dans les rues de Reveil prenant garde à ne pas bousculer de passants sur son passage. Plusieurs d'entre eux l'avaient regardés, certainement en se demandant où il pouvait se diriger ainsi, mais il ne s'attarda pas sur eux. Il n'en avait pas le temps. D'où venait-il ? De son travail de serveur auquel il devrait retourner un peu plus tard dans la journée, pour le moment il avait quelques heures de pause devant lui. Où allait-il ? Chez lui, pour le moment du moins, seulement le temps de se changer rapidement et ensuite il devait filler à l'église pour y rejoindre sa cousine. Ils avaient toujours leurs petits rendez-vous quand ils en avaient l'occasion, c'était bien plus simple maintenant qu'ils habitaient tout deux la ville. Au moins, ils en profitaient !

Rapidement arrivé à destination, il rejoignit sa chambre et attrapa quelques affaires. Il arriverait sans aucun doute du retard -c'était bien un inconvénient au travail-, mais quitte à en avoir autant que ce soit le moins possible alors il s'habilla tout aussi vite et redescendit les marches. S'asseyant au bas de celles-ci pour mettre ses chaussures, le chien de maison vint joyeusement vers lui et posa ses pattes avant sur ses genoux pour lui lécher le visage en remuant la queue. Il était bien mignon lui, ce n'était pas pratique pour Reita qui n'avait pas vraiment le temps de s'en occuper. Finalement, en le repoussant doucement, l'animal se plaça devant la porte en fixant son maître.

-Tu veux sortir ? Bon... viens là.

Le blond attrapa le Saint-Bernard pour lui l'attacher. Pas question de le laisser traîner dehors tout seul à moins qu'il ne s'agisse du jardin, il préférait encore l'emmener avec lui. L'instant d'après ils étaient donc tout les deux dehors, Happy reniflant tranquillement le sol et aboyant au passages de quelques habitants pendant que Rei assurait bien que mal à ceux-ci qu'il ne mordait pas. Au bout de quelques minutes, l'église fut enfin en vue, après avoir sonné un peu plus tôt l'heure du rendez-vous. Malheureusement, ce ne fut qu'en arrivant devant elle que l'amoureux des livres se rapella quand les animaux devaient très certainement être interdit dans ce lieu sacré. Il regarda alors la laisse qu'il avait en main, regrettant d'avoir emmené le chien avec lui. Résigné, il l'attacha aussi solidement qu'il le pouvait à l'arbre le plus proche du bâtiment, le priant -bah, il était près d'une église après tout- de rester sage le temps qu'il serait partit. Personne ne devrait avoir l'idée de s'approcher d'un aussi gros animal. Pas qu'il soit méchant, bien au contraire, c'était une grosse peluche, mais il ne se rendait pas toujours compte de sa masse alors il vaudrait mieux éviter d'approcher un enfant qui lui donnerait envie de jouer.
Une fois dans l'église, il chercha Heileen des yeux jusqu'à l’apercevoir sur un des banc où il eut vite fait de la rejoindre. Arrivé derrière le siège, il passa ses bras autour d'elle et l'embrasse sur la tête.

-Désolé de mon retard !

Reita s'installa ensuite à côté d'elle. Le lieu avait une certaine valeur significative pour eux ; ils avaient perdu tant de personnes de leur famille lorsqu'ils habitaient à Carillon. Maintenant il ne restait plus beaucoup de Blauereiss, juste eux deux et la mère d'Heileen.Ce, parce que les hommes n'acceptent pas des différences telles qu'il puisse exister des sorciers. Enfin; on ne peut pas changer le monde même en le voulant.

-Ça ne te dérange pas si l'on ne reste pas longtemps ? J'ai laissé Happy dehors.

Oui, mieux valait ne pas oublier la salle bête qu'il avait emmené avec lui. Espérons d'ailleurs que ses aboiements ne se feraient pas entendre jusque dans l'église.

[Mon titre est complètement débile, mais.. voilà. J'espère que ça te va ♥]

La porte grinça quand elle l'ouvrit. Le bruit en lui-même n'était pas assourdissant, surtout qu'Heileen avait poussé la porte avec douceur, mais il résonna dans l'église vide en rebondissant encore et encore sur les murs ornés de vitraux colorés, le transformant en un tintamarre qui brisa le calme et la sérénité des lieux et tira une petite grimace à la brunette. Elle n'aimait pas beaucoup le silence, mais celui des églises était une exception car il faisait partie intégrante de cette paix si reposante, caractéristique des lieux sacrés. Et voilà qu'un bruit horrible venait le perturber. En essayant de faire le moins de bruit possible, comme si elle avait peur de réveiller les morts, la demoiselle avança tout en savourant la fraîcheur qui régnait dans la bâtiment, bien agréable quand on a marché sous un soleil de printemps.

Elle jeta finalement son dévolu sur un banc situé environ à mi-distance entre l'entrée et l'autel, que ses yeux bleus fixèrent, et s'assit en prenant bien garde de laisser à côté d'elle une place facilement accessible depuis l'allée centrale pour son cousin qui devait arriver d'un moment à l'autre. Ils s'étaient donnés rendez-vous ici afin de pouvoir prier un instant pour les membres de leur famille décédés, ce qui faisait quand même un bon nombre, avant de se balader comme ils le faisaient souvent depuis que Reita s'était installé à Réveil. Quand il lui avait annoncé la nouvelle, Heileen était tellement contente qu'elle avait presque réussi à le faire reculer en se jetant à son cou. Presque. Parfois, elle se demandait comment la différence de taille entre eux pouvait être si grande alors qu'ils étaient de la même famille... Bref, une dizaine de minutes passèrent avant que notre sorcière, qui était arrivée légèrement en avance, ne se rende compte que son cousin était en retard. Elle sourit en l'imaginant en train de courir dans les rues, bien décidé à réduire au minimum la différence entre l'heure fixée et son heure d'arrivée. Mais alors que la scène se jouait dans sa tête, des bras vinrent l'entourer alors qu'on lui baisait les cheveux en présentant des excuses. Levant le visage, l'occidentale put voir Reita se déplacer et suivit ses gestes du regard, l'air amusée.

- Non, je ne te pardonne pas. J'ai l'impression de t'attendre à chaque fois !

Ce qui était parfaitement faux, les deux le savaient. D'habitude, le bond était d'une ponctualité remarquable tandis qu'elle arrivait pile à l'heure. Il demanda ensuite s'ils pouvaient ne pas s'attarder, parlant de Happy... Ah, si sa mémoire ne lui jouait pas de tour, c'était son Saint-Bernard !

-Pas de souci !

Cela dit, Heileen reporta son attention sur l'autel et ferma les yeux pour prier. Comme à chaque fois, des souvenirs lui parvinrent plus ou moins nettement : les flammes, encore des flammes, un brasier qui s'étendait partout. C'était tout ce dont elle arrivait vraiment à se rappeler de leur fuite, le reste était difficile d'accès. Ensuite, il y eut leur arrivée dans la capitale et les mois de galère avant que sa mère ne trouve un emploi stable et suffisant pour les nourrir et les loger convenablement sans qu'elles n'aient à se priver. Elle se souvint aussi que, petite, dès qu'on essayait de la faire rentrer dans une église, une crise de nerfs atroce la prenait. L'enfant qu'elle était n'aimait pas ce lieu qui servait à chérir la mémoire des morts et où ils pleuraient à chaque fois. Aujourd'hui les larmes étaient taries, c'était certainement grâce à cela que la jeune femme parvenait à apprécier l'endroit maintenant. Mais à quoi cela servirait de larmoyer ? Le deuil avait été fait, alors continuer à pleurer ne servirait qu'à prolonger la douleur et ne serait certainement d'aucun secours aux personnes décédées. On dit que pleurer fait du bien, mais trop pleurer ne sert qu'à se torturer soi-même et à se noyer dans son malheur. C'est ce qu'elle pensait sincèrement, mais cela n'empêchait pas la tristesse de s'insinuer. Prenant une respiration profonde tout en terminant le rituel, elle releva le visage et quitta son siège pour aller lentement allumer quelques bougies pour les âmes des morts. Notre sorcière se tourna ensuite vers son cousin, les lèvres étirées par sa bonne humeur habituelle.

-Allons-y ! Happy nous attend. Puis un fait la frappa. Je ne t'ai pas demandé comment tu allais !

En voilà une cousine indigne ! Bref, les deux Blauereiss sortirent retrouver l'énorme chien que la zoophile s'empressa d'enlacer par le cou pour le saluer. Laissant à Rei le soin de détacher l'animal, elle attendit les bras croisés dans le dos qu'il ait la laisse bien en main avant de reprendre la parole.

-Au fait, où allons-nous ?

Les années avaient beau s'écoulées, certaines choses ne semblaient pas changer. Beaucoup d'éléments dans la vie de Reita avaient changés du jour au lendemain, quand il avait perdu ses parents à l'âge de dix ans, se retrouvant orphelin ; lorsque Leïla s'était fait assassinée alors que la journée aurait du bien se passer ; quand la décision de déménager à Réveil avait été prise. Oui, tout peut rapidement basculer du tout en tout, mais s'il y avait bien une chose qui n'avait jamais changé et auquel il tenait beaucoup, s'était la relation qu'il entretenait avec sa cousine. Certes, ce serait mentir de dire qu'elle n'avait pas du tout changé, en réalité elle avait évoluée ce qui était encore mieux. La relation de deux enfants et celle de deux adultes ne peut bien entendu pas être la même. Petits, ils se voyaient régulièrement quand leurs parents se donnaient rendez-vous, par la suite ils avaient passés de longues années en correspondance par lettre et en se voyant à l'occasion, et à présent il s'agissait de rendez-vous qu'ils se donnaient dès qu'ils le pouvaient. Avec le temps ils pouvaient tout deux se vanter de bien connaître l'autre.

Reita laissa échapper un léger rire à la phrase d'Heileen. Elle plaisantait bien sûr, il arrivait le plus souvent en avance que en retard. Bien, l'heure était maintenant à la prière puisque qu'ils ne s'étaient pas rendu à l'église pour rien.

Ses yeux se fermèrent à leur tour, repensant à se qu'ils avaient pu vivre jusque maintenant. Les décès s'étaient fait nombreux dans la famille pour une raison qui dépassait toujours autant le jeune homme. Des flammes qui avaient tout réduit en cendre sur son passage, rappelant ses histoires de sorcières et sorciers brûlés sur un bûché parce qu'ils sont jugés comme étant diabolique et porteur de malheur. Jamais le jeune blond ne prendrait un jour le risque de confier à quelqu'un qu'il en connait ou même que ce genre de personne existe, même s'il y avaient des chances que le destinateur de le croit pas. Il refusait l'idée de pouvoir mettre en danger les derniers membres de la famille Blauereiss qu'il lui restait. C'était les villageois qui devraient se rendre à l'église pour purifier leurs crimes. Bon, ce n'était pas son genre d'avoir un esprit vangeur, même si repensser à ses évènements déclenchaient de la colère en lui, ce n'était pas la peine de rester la-dessus, rien ne changerais pour autant et il était trop tard pour faire une quelconque moral. L'important désormais était que sa tante et sa cousine puissent de nouveau sourire comme avant, le reste appartenait au passé. La pirère terminée, il laissa Hei allumer des bougies pour ainsi terminer le petit rituel, elle lui sourit ensuite pour de nouveau s'adresser à lui.

-Je vais bien, merci ! Et toi, comment vas-tu ?

Ils sortirent ensuite du bâtiment pour rejoindre le saint-Bernard que l'apprentie vétérinaire enlaça en le voyant. Rei le détacha ensuite en prenant soin à ce qu'il ne bouge pas trop, il n'avait pas envie de se retrouver embarquer par l'animal à peine détaché. Une fois la laisse bien en main, la question de l'endroit où ils allaient se rendre aujourd'hui fut posée.

-Ça te plairait de faire un tour dans la rue marchande ? Je crois qu'il y a un marché cet après midi.

En y repensant, c'est de là que devait venir toutes les personnes qu'il avait eu peur de renverser en venant. Les rues étaient déjà pas mal bondées dans le centre-ville en temps normal, alors quand quelque chose était prévu elles l'étaient d'autant plus. De plus, cette ville était bien plus grande que celle où il avait vécu toutes ses dernières années, ce n'était pas la capitale pour rien évidemment, alors ils devaient y trouver beaucoup plus de choses. Et puis, un marché était fait pour proposer de tout, plus particulièrement si ce n'en est pas un simple qui a lieu à peu près tous les jours pour proposer des vivres. Par la suite, ils auraient certainement le temps de faire un tour ailleurs ou de faire autre chose.

Une prière est comme un salut aux morts, mais aussi une manière d'entretenir leur mémoire. Comment s'empêcher, un priant pour une personne que nous avons perdue, de repenser à tout ce qu'on a vécu avec elle, de ce qu'elle était pour nous ? C'était comme entendre ce qu'on nous a déjà dit une fois mais que nous avions oublié, le souvenir revient tout à coup et nous rigolons devant notre mémoire de poisson rouge. Dommage que les personnes dont Heileen honorait la mémoire ne puissent pas revenir aussi facilement que ses souvenirs. C'est étrange, comme un instant de notre vie peut rester graver en nous à jamais, même après la disparition de ceux avec qui nous le partagions. Et triste aussi, quand nous sourions avec amertume en nous disant que nous n'avons personne avec qui évoquer l'anecdote – en riant bien sûr, parce qu'on rit souvent du passé. Où étaient donc ces personnes, n'étaient-ils plus que des fantômes hantant sa mémoire ? Son père ne la soulèverait plus jamais de ses bras forts pour la mettre sur ses épaules, sa sœur n'était plus là pour parler avec elle pendant des heures et des heures de tout et de rien. On dit que même si une personne passe de vie à trépas, quelque part elle restera en vie à travers notre mémoire. Non seulement celle de la sorcière n'était pas une valeur sûre, mais elle préférerait quand même revoir ces êtres chers au lieu de devoir se contenter de contempler ses souvenirs. Et puis il y avait aussi le fait que trop y penser faisait mal : c'est la meilleure manière de se retrouver à rêver de ce qu'aurait été notre vie si certaines personnes en faisaient encore partie en chair et en os, mais le réveil était toujours difficile. Les rêves comme l'espoir sont une belle chose, mais le moment où ils se brisent est horrible et horriblement douloureux. Non, mieux vaut apprendre du passé plutôt que le contempler en se demandant pourquoi les choses pouvaient si mal tourner.

Garder ses souvenirs n'est au fond pas une mauvaise chose, du moment qu'ils ne nous obnubilent pas. Cela nous ferait oublier ce qu'on doit absolument garder à l'esprit : le présent. A l'instant présent, la brunette se trouvait près de quelqu'un qu'elle aimait énormément. Son cousin comptait beaucoup pour elle. Heileen avait beau être une tête de linotte, elle avait retenu quelques leçons de son vécu et l'une d'entre elles était de profiter de ses proches tant qu'on le pouvait. On ne sait pas quand on les perdra, donc chaque seconde est bonne à prendre, même si celle-ci n'était au final qu'une seconde de silence. Parce même si on parle de silence tous les jours, ce n'est en rien comparable à celui qu'impose la mort : la respiration qu'on pouvait entendre en se concentrant cesse, la voix s'éteint à jamais et tente d'échapper à notre mémoire. On pouvait la trouver collante par moments, mais elle s'en fichait bien. C'est pour cela qu'appendre que Reita allait emménager à Réveil lui avait autant fait plaisir : cela signifiait qu'ils pourraient se voir plus souvent, que leurs conversations ne tiendraient plus sur le papier des nombreuses lettres qu'ils échangeaient. Loin des yeux, loin du cœur ? Pas quand on avait écrit assez de missives pour publier un roman épistolaire, les deux jeunes gens avaient partagé énormément grâce à ce moyen de communication, ils ne s'étaient donc jamais éloignés. Et puis, selon ce proverbe, l'affection que nous portons à une personne diminuerait après sa disparition, or si c'était le cas la demoiselle n'aurait plus de pincement au cœur en pensant à sa famille en toute logique. Seulement, les sentiments n'étaient pas gouvernés seulement par la logique, donc chercher une raison qui coulait de source à ce qu'on éprouvait était souvent une perte de temps.

C'était tout ce qui lui avait traversé l'esprit alors qu'elle priait, les yeux fermés. Tout ce à quoi elle ne pensait pas en règle général, qui était banni. Le rituel terminé, la brunette leur avait de nouveau interdit l'accès et s'était levée pour allumer des bougies, puis avait encore une fois démontrée qu'elle était tête en l'air : comment oublier de demander si votre cousin allait bien, par Heileen Blauereiss. Quand il lui retourna la question, le sourire de la sorcière s'agrandit.

-Très bien, merci !

Nos deux protagonistes sortirent alors retrouver Happy que le blond détacha de l'arbre. Cela fait, il répondit à sa question en proposant un tour dans les rues marchandes, la faisant hocher de la tête en signe d'approbation.

-D'accord ! Mais... Son ton se fit songeur. On devrait peut-être ramener Happy avant ? Il y aura beaucoup de monde au marché, et certains prendraient peur en le voyant.

Reita étant d'accord avec elle, ils allèrent déposer le chien qui sembla triste de les voir repartir sans lui, puis mirent le cap sur leur destination. C'était l'effervescence, les rues étaient noires de monde et chacun cherchait la meilleure affaire en essayant de jeter un coup d’œil par-dessus les épaules des personnes présentes devant les étals. Cette animation était plaisante, Heileen ne pouvait empêcher ses lèvres de s'étirer gaiement. Les deux Blauereiss se joignirent à la foule des acheteurs potentiels, regardant tout ce qu'ils pouvaient en se demandant à chaque fois s'ils allaient l'acheter. Au bout d'un moment, ils se retrouvèrent chacun avec un sac à la main et s'apprêtaient à sortir du marché quand un homme bouscula notre occidentale.

-Oh, pardon !

Un mot qu'elle l'aurait peut-être pas prononcé si elle avait su qu'il l'avait fait exprès, pour attraper violemment son sac et partir avec. La petite sorcière grimaça en sentant que ses doigts étaient forcés à lâcher leur prise, puis réalisa que l'inconnu venait de lui voler ses courses... Oh le goujat, il ne payait rien pour attendre !

-Hé, reviens là voleur !

Oui c'était parfaitement inutile, mais c'était sorti par réflexe et cela ne l'empêcha pas de se mettre à lui courir après. Ils auraient mieux fait de garder le Saint-Bernard avec eux tiens, Hei aurait été ravie de pouvoir compter sur son aide pour le coup...

Il n'y avait pas réellement besoin d'être croyant pour se rendre à l'église et prier. Après tout, la prière était là pour rendre hommage aux défuntes personnes ayant composées notre vie. Ceux qui croyait en Dieu portait leur croyance surtout parce qu'il avait besoin d'expliquer certains phénomènes par l'existence d'une puissance irrationnel ou parce qu'ils avaient besoin de croire en l'existence d'une personne qui pouvait leur venir en aide en cas de besoin simplement en faisant ce qu'ils appelaient un miracle. Une puissance qui punissait ceux qui se trouvaient dans le pêché aussi. Reita ne faisait pas partit de ces croyants ; il n'était pas non plus de ceux que le clergé aurait caractérisé d'hérétique. Personne n'avait prouvé l'existence d'un identité surpuissante, mais personne n'avait non plus prouvé qu'elle n'existait pas alors il se refusait d'affirmer l'une de ces deux choses. Cependant si elle existait réellement, il ne pourrait croire que ça famille avait été puni du crime d'appartenir au rang de sorcier et si certains semblaient l'affirmer, pour lui ce n'était qu'une folie des hommes. Concernant l'homme qui avait tué Leïla, il était mort d'une façon tant surprenante et sans raison visible qu'il pourrait, éventuellement, être une victime de la punition divine ou peut-être y avait-il une raison plus rationnel. Aucune de ses deux raisons ne le dérangeait en tout cas, l'important était qu'il ne pourrait plus jamais faire de mal à qui que ce soit. Rei aurait pourtant aimé savoir qu'elle genre de chose pouvait rendre un homme suffisamment fou pour en venir à commettre un meurtre, mais c'était un autre sujet encore.

Les souvenirs restent, le temps passe et les gens changent ; c'est indéniable. Il est impossible de garder des souvenirs aussi nettement au fur et à mesure des jours, des années. Les plus mauvais sont ceux qui restent les plus présents dans nos esprits alors que ce sont les bons que nous devrions garder ancrés en nous. Malheureusement, on ne peux rien faire contre notre mémoire, tous ce que nous avons vécu reste dans un coin de notre tête seulement nous ne parvenons pas toujours à mettre la main dessus. Il se peut qu'un lieu, une odeur ou un son nous fait penser à une chose mais nous ne savons quoi. De la même façon, certains flash peuvent nous venir, sans plus. C'était pour cette raison que des personnes écrivait leur mémoire dans des livres pour être sûr d'avoir ce sont ils voulaient se rappeler inscrit quelque pas ; le jeune homme le faisait parfois. Les photos avaient un but semblable, garder des images pour se remémorer un instant important ; on pouvait leur donner d'autre buts bien sûr.

Son sourire s'élargit à son tour, sa cousine était peut-être un peu tête en l'air, mais ça pouvait être amusant parfois. Il aimait bien la taquiné avec de temps en temps, parce que qui aime bien châtie bien, n'est-ce pas ? Aaron avait du avoir une certaine influence sur lui quand ils étaient plus jeune tout de même, il était plus taquin qu'avant.

Sa cousine approuva son idée d'aller au marché qui avait lieu ce jour-là, elle mit par contre en évidence un point auquel il n'avait pas pensé : il serait plus raisonnable de ramener Happy à la maison avant d'y aller pour éviter de faire peur à qui que ce soit. Il était vrai que c'était le mieux à faire. De plus, promener un gros chien au milieu d'une foule de personne n'était pas le plus simple. Pour cette raison, il accepta immédiatement cette idée et ils allèrent tous deux déposer le Saint-Bernard chez lui. Ce dernier n'avait pas vraiment l'air d'accord d'être déjà rentrer à la maison, mais la légère promenade avait tout de même dû lui faire du bien. Ceci fait, ils retournèrent rejoindre les rues où se trouvait le marché. Elle était noir de monde en cette heure, preuve d'événement peu habituelle qui attirait les habitants et surement des personnes venus du coin pour l'occasion. En regardant les différents étals qui s'y trouvait -pas bien difficile quand on fait un mètre quatre-vingt cinq- Reita pouvait voir qu'il y avait effectivement de tout. Il avait beau apprécier le calme, en particulier pour lire ou écrire, l'animation présent n'était pas déplaisante. En fait, ça avait quelque chose d'agréable de voir tout ces marchands plein d'entrain, discutant de leurs marchandises aux clients. Au final, il n'aura fallu guère de temps pour que les deux Blauereiss se retrouvent chacun avec un sac où se trouvait les achats qu'ils avaient effectués. Le tour terminé, ils s'apprêtaient enfin à sortir du marché.

L'action fut rapide, en moins de temps qu'il n'en aurait fallu pour le dire, un homme bouscula Heileen volontairement de façon à voler son sac. Sauf que s'ils avaient su dès le début ses intentions ils auraient peut-être pu l'en empêcher. Résultat, les voilà rapidement mit à la poursuite du voleur pour essayer de récupérer leurs affaires. Poursuite qui aurait surement été plus simple avec Happy en y pensant, mais ils ne pouvaient évidemment pas le deviner quand ils l'avaient ramenés au bercail. De toute évidence, il était un peu trop tard pour y penser à présent. Ils ne comptaient pas pour autant lâcher l'idée de récupérer les achats et l'instant d'après ils se trouvaient à tourner au détour d'une ruelle.

-On l'a perdu de vu ?

Plus une constatation qu'une véritable question, mais elle ne devrait normalement pas avoir lieu. Il n'avait pas pu les semer aussi vite alors qu'il était devant eux un instant plus tôt encore. La réponse lui apparut vite sous les yeux : l'homme tentait maintenant de leur échapper en escaladant un mur suffisamment bas d'accès pour qu'il puisse fuir.

-Le voilà !

Son désavantage actuellement c'est qu'il ne devait pas être bien pratique de gravir un mur avec un sac à la main, voilà qui leur donnait une occasion de l'attraper. Reita déposa son propre sac pour ne pas être gêné lui aussi par cet encombrement et entreprit à son tour une ascension. Il l'aurait, foi du rat de bibliothèque qu'il était -oui, qualifier ainsi il n'avait rien d'impressionnant, mais ce n'était pas la même histoire quand on voyait son physique.

Heileen était heureuse de pouvoir passer un peu de temps avec son cousin. Pendant de nombreuses années après l'adoption de Reita, ils avaient dû se contenter de leurs missives et ne se voyaient que très rarement, alors elle avait été très heureuse d'apprendre qu'il allait emménager à Réveil. Non pas que la distance qui les séparait avant faisait qu'ils n'étaient pas proches, au contraire puisque le jeune homme était en quelque sorte son confident et l'une des personnes vers lesquelles elle se tournait en premier quand elle cherchait des conseils et un soutien, mais ce n'était pas la même chose de s'envoyer des lettres ou de pouvoir se rendre visite, organiser des petites sorties, se parler de vive voix et avoir la personne près de soi. Désormais, ils pouvaient s'entendre rire et elle avait pu redécouvrir le penchant tactile du blond. Et puis en habitant dans la même ville, l'un des principaux avantages est que si l'envie les prenait ils pouvaient organiser une sortie, comme celle qui avait lieu aujourd'hui. Quoi que citer leur rendez-vous à l'église n'était peut-être pas un bon exemple, après tout ils allaient prier pour les défunts régulièrement certes, mais certainement pas tous les jours. Autant l'avouer, si elle n'avait rien contre les églises ou le fait de rendre hommage à ses proches perdus – au contraire, se souvenir d'eux était quelque part soulageant -, ce n'était pas non plus ses sorties favorites. On fait tout de même plus joyeux.

Une fois sorti du lieu sacré, les deux Blauereiss décidèrent de se rendre au marché mais durent ramener l'impressionnant Saint-Bernard de Reita avant. Happy n'était pas méchant, loin de là, mais beaucoup s'imaginent qu'un gros chien est forcément dangereux alors que c'est tout à fait faux. Le plus souvent ces grosses peluches sont affectives et tendres, tandis qu'à l'inverse les plus petits chiens sont de petites teignes, qui aboient beaucoup et mordent comme s'ils se prenaient pour de gros spécimens capables d'effrayer tout le monde. Ceux-là étaient très vifs, c'était ce qui les rendait amusants. Mais il y avait aussi les chiens intermédiaires, qui pouvaient avoir le caractère des petits comme des grands. C'étaient les favoris d'Heileen, même si au final elle les aimait tous – une véritable amatrice d'animaux, que je vous dit. Mais au fait, en parlant de ça.... Alors qu'ils faisaient route vers le marché, elle annonça une nouvelle récente.

-la prochaine fois, je ramènerai le chien qu'on a adopté récemment chez toi !

Dit-elle, tout sourire. Happy et son petit Aeron allaient probablement bien s'entendre.
Les deux jeunes gens arrivèrent enfin à leur destination et ne tardèrent pas à faire quelques acquisitions. Tout était tranquille malgré l'effervescence ambiante, et le serait resté si ça n'avait pas été pour ce vol.
Le saint-Bernard avait raison de vouloir rester avec eux plus longtemps. Il avait dû sentir que sa présence empêcherait le pickpocket de s'en prendre à la jeune femme.
Elle n'avait pas immédiatement compris ce qui venait de se passer, mais en voyant que le sac qu'elle tenait à la main l'instant d'avant était désormais entre celles d'un inconnu notre petite sorcière s'était précipitée à sa suite, talonnée de près par son cousin. Au moins n'était-elle pas seule contre l'homme.

Une course poursuite commença alors entre le voleur et les volés, ces derniers étant bien décidés à ne pas le laisser s'en tirer si facilement. Rapidement ils se retrouvèrent à s'engouffrer dans une ruelle qu'on aurait pu prendre pour un cul de sac, mais celui qu'ils poursuivaient devait bien connaître le coin puisqu'il savait qu'escalader le muret était parfaitement possible. Si cela allait les arrêter ? Oh que non, et le premier poursuivant à commencer l’ascension de la paroi fut Reita. Le regardant commencer à grimper, Heileen eut envie de bouder : avec sa taille, elle aurait beaucoup plus de mal à suivre la cadence... Seulement, c'était sans compter sur les caisses empilées au pied du mur. Quand son regard se posa dessus, les lèvres de la brunette s'étirèrent. Elle était encore dans la course.
Vivement elle se lança sur une caisse puis grimpa sur la suivante, avant de monter sur les épaules de son colosse de cousin pour passer l'obstacle, non sans s'adresser à son marche-pieds non consentant.

-Désolée et merci, Rei !

Le tout avec un petit sourire d'excuse, parce que ce n'était tout de même très sympathique de sa part, puis la voilà qui sautait sur un tas de sacs de farine de l'autre côté pour se remettre à courir, sûre que son partenaire parviendrait à la rattraper.
La course poursuite se poursuivit sur quelques kilomètres, entre les ruelles étroites et celles remplies de monde. Essoufflée et les jambes engourdies, Heileen fatiguait et commençait à ralentir. C'est que ce fuyard était drôlement rapide et endurant, une question d'habitude certainement.... Mais bon, là, ça commençait à faire long.
Une ruelle. Encore. Et toujours ses jambes qui tiraient horriblement. Alors qu'elle continuait la course sans relâcher ses efforts, les yeux de l'occidentale se posèrent sur une vieille chaussure qui traînait, à l'abandon. Sans réfléchir, elle s'en saisit et le lança de toutes ses forces – soit assez pour soulever des animaux pouvant peser plus de cinquante kilogrammes – sur la tête du voleur. Celui-ci trébucha et se retrouva à terre, ce qui fit naître un sourire heureux de victoire sur le visage de la demoiselle.

-On le tient !

S'exprimer de vive voix avait toujours été difficile pour Reita, bien plus qu'à ne l'écrit. Le plus simple à l'écrit, c'est de pouvoir prendre son temps de chercher ses mots, de les modifier après réflexion s'ils ne nous satisfait pas ou même de recommencer depuis le début. À l'oral par contre, à partir du moment où les mots ont franchis nos lèvres, le retour en arrière n'est pas possible. De plus, les émotions prennent vite place dans la conversation. Par lettre, on peut attendre de prendre du recul pour ne pas nous laisser influencer par nos sentiments au moment présent, ne pas réagir sous un coup de colère par exemple. Et puis, il savait que ce n'était pas le cas de tous, mais lui avait plus facile à exprimer ses émotions par écrit. Peut-être parce que l'on n'avait pas à affronter le regard de notre interlocuteur, la timidité œuvrait moins. À moins qu'ouvrir la bouche ne demande plus d'effort que de se servir d'un stylo -on pourrait un jour essayer de démontrer ça scientifiquement. Pour autant, on ne pourrait jamais retrouver les même choses dans des conversation écrites que orales, pouvoir observer les réactions de la personne en face et la toucher était un avantage. À distance on se sent impuissant lorsque quelqu'un a besoin de réconfort. Autant il avait aimé les échanges de lettres entre sa cousine et lui, autant maintenant il se sentait soulagé de pouvoir la voir régulièrement et en chair et en os.

Le blond avait toutes sortes de passion, comme chaque être humain se sentant un minimum concerné par ce qui l'entoure. Parmi ces dernières ce trouvait celle des animaux. Il y avait Happy, cette grosse boule de poil affective qui semblait parfois effrayante aux yeux des inconnus alors qu'elle était plus douce qu'une agneau. Les gros chiens avaient toujours quelque chose d'impressionnant, celui-ci n'échappait donc pas à la règle. Pour en revenir à la dite passion, elle était partagée par Heileen, peut-être plus que lui même. Sa proposition d'amener son chien avec elle la prochaine fois le tentait bien, en effet. Cela permettrait de faire se rencontrer leur animal respectif. Si le saint-Bernard s'entendait bien avec lui, il pourrait même tenter de convaincre Aaron d'en prendre un nouveau -on pouvait toujours essayer après tout.

 - C'est une très bonne idée.

Alors que tout était tranquille jusqu'à présent, l'instant avait du être gâché par un vol à la tir. Il était vrai que dans une grand ville comme Réveil, ceci devait être plus fréquent qu'à toute autre endroit. Le coupable pouvait venir des rues sombres et mal fréquentés de l'agglomération, c'était dans ces endroits que se trouvaient la plupart des habitants qu'il valait mieux éviter si l'on voulait éviter les ennuis. C'était aussi là-bas que se produisait généralement les choses les plus étranges et obscurs, vraiment pas un lieu où l'on convoiterait de faire une virée avec quelqu'un, sauf pour préparer un mauvais coup. Y traîner équivaudrait à paraître louche, rien de plus -surement à s'attirer des ennuis avec ceux qui s'y trouve aussi.

Suite à la course poursuite, ils se retrouvèrent dans un cul de sac et Rei avait commencé sans plus d'hésitation à escalader le mur. Sa cousine aurait eu plus de mal à suivre la cadence, mais c'était sans compter sur sa ténacité. Sans réellement avoir le temps de comprendre, elle franchit déjà une distance grâce à des caisses jonchant le sol et passa le reste de l'obstacle en grimpant à ses épaules. On pouvait bien dire qu'elle avait été inventive et efficace.

 - Y'a pas de quoi, rit-il légèrement.

Le blond ne tarda pas à rattraper son retard en franchissant à son tour le mur pour atterir de l'autre côté sur des sacs de farine avant de reprendre sa course. L'homme qu'ils poursuivaient ne devait pas être bien habitué à se retrouver face à des adversaires autant têtu. Il courait bien néanmoins, l'habitude de devoir fuir certainement, mais eux ne comptait pas se laisser distancer ainsi. Finalement, après avoir encore longuement couru ce qui leur avait valu de passer par différentes ruelles, Heileen parvint à stopper sa progression en lui envoyant une chaussure. Décidément, elle gérait aujourd'hui sa cousine, elle qui était parfois si maladroite. En tout cas, Reita s'empressa d'aller aux côtés du voleur pour reprendre le sac et être prêt à le maintenir au cas où il se réveillerait.

 - Bien joué, dit-il à l'adresser de la brune avec un côté admiratif.

Le voilà rassuré maintenant qu'ils avaient récupérés leur bien et mis hors d'état de nuire le coupable. En le livrant, il ne pourrait plus voler personne. Pourquoi agir ainsi d'ailleurs ? Par manque d'argent ? Ce serait malheureux, mais un vole restait un vole, on y pouvait rien. À présent, il avait bien besoin de reprendre un peu son souffle , la fatigue gagnerait n'importe qui venant de courir dans tout les sens pour attraper quelqu'un. Enfin, ils n'en avaient pas encore tout à fait terminé avec lui pour le moment.

 - On devrait le dénoncer aux autorités.

Heileen n'était pas une grande amatrice de sport, loin de là. Elle n'avait pas à se plaindre de ses capacités physiques, certes, mais cela ne faisait pas tout – il lui manquait la passion, ses dadas étaient plutôt ses proches et la faune. Si vous lui demandiez de choisir entre courir un semi-marathon et passer la journée à soigner des animaux avec son maître d'apprentissage, se balader avec sa famille ou encore chouchouter son husky, il ne lui faudrait pas plus de trois secondes pour évincer sans appel la première proposition avant d'hésiter longuement entre les autres. Seulement il est des moments dans la vie d'une personne où celle-ci n'a pas le choix, c'est ce que nous appelons couramment « la force des choses ». C'était ce genre d'instant que vivaient nos deux jeunes Blauereiss, à courir dans les rues marchandes et les ruelles adjacentes dans l'espoir de récupérer le sac qu'un voleur à la tirette tenait fermement à la main – car ce n'était pas une envie subite de jouer à chat qui avait poussé la demoiselle et son cousin dans cette course poursuite, vous imaginez bien qu'avec sa carrure et le fait qu'elle n'était pas une sportive dans l'âme elle préférait encore jouer à cache-cache. Seulement celui qu'ils poursuivaient semblait être dans le cas inverse, ce qui n'avait rien d'étonnant quand on voyait à quel vitesse il pouvait détaler – pratique, quand on devait s'adonner régulièrement le même genre d'exercice que celui auquel le trio se livrait sous l'indignation de la foule.

Et non seulement notre petite sorcière n'était pas du genre à faire le tour du pâté de maison au pas de course juste sur un coup de tête et par pur plaisir, mais en plus elle était parfaitement capable de se cogner la jambe droite avec la gauche – ou inversement – tout en courant. Eh oui, elle était plutôt du genre maladroite – enfin surtout distraite: souvent ces incidents se produisaient quand Heileen ne regardait pas ses pieds, or elle n'y faisait que rarement attention, ses yeux trouvaient toujours quelque chose de plus intéressant à contempler ailleurs. Cela lui valait régulièrement de gentilles railleries de la part de ses amis et sa famille, qui rigolaient à chaque fois qu'elle butait dans un trottoir. Bon quand dans sa maladresse la brunette cassait quelque chose c'était une autre histoire, encore heureux qu'elle n'ait jamais rien cassé de bien cher ou de très important d'ailleurs, mais jusqu'ici elle n'avait pas eu d'ennui sérieux. Mais n'empêche, quand on sait que son pied droit peut se transformer en second pied gauche, la voir s'en tirer aussi bien dans la poursuite du voleur était étonnant hein ? L'adrénaline peut avoir des effets inattendus, ou alors l'apprentie vétérinaire rencontrait un peu de chance. Non pas qu'elle allait s'en plaindre hein, parce que se retrouver face contre terre toutes les dix minutes n'aurait pas été pratique, pour ne pas dire que le voleur leur aurait probablement filé entre les doigts. Qu'importe la raison de sa soudaine donc.

En revanche, Heileen n'avait toujours pas pris goût à l'exercice. Courir dans tous les sens pour rattraper quelqu'un était fatiguant, elle n'en pouvait quasiment plus quand son regard se posa sur une vieille chaussure et qu'elle eut l'excellente idée de la jeter sur la personne qu'ils poursuivaient. Un lancer qui lui aurait valu un strike lors d'une partie de bowling, mais faire tomber le fuyard était tout aussi bien : cela leur permit de le rattraper. En le voyant chuter la jeune femme se sentit heureuse et triomphante, un état qui la fit ralentir et permit à son cousin de prendre de l'avance. Reita se plaça à côté de l'inconnu et exprima une certaine admiration pour la sorcière, qui rit bien.

-Merci !

Un mot qui sortit entre deux respirations profondes, parce qu'elle était exténuée. Le blond l'était tout autant d'ailleurs, lui qui passait plus de temps le nez dans les livres qu'à faire de la gonflette devait aussi sentir que ce petit marathon avait prélevé son dû en forces. M'enfin, c'était terminé désormais ! Ils allaient pouvoir continuer leur petite journée entre parents, après s'être occupés du garnement... Tiens, que pouvaient-ils bien en faire ? La meilleure solution fut celle proposée par Rei : alerter les autorités, histoire que le chapardeur n'embarque plus les sacs des autres. Pour prouver son assentiment, notre occidentale commit une erreur fatale : elle hocha la tête. En quoi cela pouvait bien être catastrophique ? Eh bien disons qu'elle était en manque d'oxygène à cause de la poursuite, que ses tous muscles tiraient atrocement et que, sous l'effet du soulagement provoqué par la capture de leur homme, sa maladresse était de retour et prête à frapper à tout moment. Aussi simple puisse être un mouvement vertical du menton, ce geste lui fit perdre l'équilibre l'espace d'une demi-seconde – juste assez pour trébucher bêtement et tomber en avant. Et pour que son succès soit total Heileen emporta son cousin dans sa chute, une occasion rêvée sur laquelle le voleur se jeta sans retenue en prenant rapidement ses jambes au cou. Toujours à terre, les deux Blauereiss ne purent que le regarder disparaître aussi rapidement qu'une flèche, leur échappant bel et bien. Une expression dépitée sur le visage, la jeune brune finit par se relever en poussant un soupir.

-Désolée...

Car c'était de sa faute pour le coup. Mais au moins, ils avaient récupéré le sac. Eh mais, en parlant de sac... Ils avaient laissé les autres derrière eux, plus tôt, non ? Quand elle s'en rendit compte, elle en fit part à Reita et ils revinrent sur leurs pas. Par chance les emplettes étaient encore là et le contenu n'avait pas bougé, ils purent donc s'en aller l'esprit assez serein. C'est alors qu'Heily eut une idée.

-Hé ! Et si on passait prendre Happy puis qu'on allait à la maison ? Comme ça il rencontrerait Aeron.

Reita et sa cousine avait tout deux pas mal de point commun, dont celui de ne pas être très sportifs. Le blond était pourtant né avec l'avantage de posséder une carrure plutôt impressionnante, déjà rien que par sa taille. Pour autant, il n'avait jamais réellement cherché à la développer ou même à l'entretenir. Non, le jeune homme était plutôt ce que l'on pouvait qualifier de rat de bibliothèque et ce même si l'un de ses travail n'avait pas été de s'occuper de l'une de ces fameuses bibliothèques. C'était justement par sa passion des livres et parce qu'il y passait tant de temps qu'il avait souhaité pouvoir y travailler en dehors de son autre travail de serveur. Deux univers plutôt différent, il fallait l'avouer, mais il appréciait bien ce travail aussi -et l'un des cuisiniers était très sympathique.* Il s'était souvent chamaillé avec Aaron et Adriel à propos de ses deux travail. Il était vrai que de vivre avec des nobles et choisir ce genre de petits travaux formait une certaine antithèse, mais il tirait tout de même une certaine fierté de ce qu'il faisait.

Tout de même, pour deux personnes qui ne pratiquaient pas tellement de sport, ils s'en étaient plutôt bien sortit durant leur course poursuite avec leur voleur. Eh bien, avec l'adrénaline et la motivation d'attraper quelqu'un, l'endurance se faisait plus facilement. Ce qui ne les empêchaient pas d'avoir maintenant besoin de récupérer leur souffle, ça avait été une sacrée course quand même ! Au moins, ils pouvaient être fière de leur exploit, celui d'Hei en particulier. Elle qui était d'habitude si maladroite prouvait bien qu'elle était capable d'adresse quand elle en avait besoin.

Cependant, on dit toujours qu'il ne faut pas vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué, ils auraient surement mieux fait de ne pas crier victoire trop vite. Autant en ce qui concerné le voleur que pour la maladresse de la brunette. Rei ne savait pas réellement comment elle avait fait, mais le résultat était bien là : elle avait trébuché, l'entraînant par l'occasion dans sa chute et tout deux s'étaient alors retrouvés face contre terre, tout comme l'avait été, auparavant, l'homme qui leur avait causé du tord. Auparavant, car maintenant il détalait de nouveau, profitant que ses bourreaux aient cédés à l'inatention.
La situation aurait pu prendre de la gravité, mais l'air dépité d'Heileen donnait plutôt envie de rire et en la connaissant depuis longtemps ce genre de chose devenait presque habituel. Même si habituellement il n'y avait pas de malfrat concerné. Enfin, ce n'était pas si grave. Ils avaient récupéré leur sac et n'étaient pas blessé, c'était le plus important. Le blond se laissa alors aller à un léger rire durant quelques minutes.

- Ce n'est pas si grave.

Son hilarité passé, les deux jeunes allèrent retrouver les sacs qu'ils avaient laissé derrière eux auparavant, il n'y aurait peut-être plus pensé si elle ne leur avait pas rapellé. Il ne leur fallu pas longtemps pour les retrouver, mettant définitivement fin à toute cette aventure.

- Bonne idée !

Heily avait proposée de retrourner prendre Happy pour le faire rencontrer son chien. Le jeune homme avait bien envie de rencontrer l'animal concerné et le Saint-Bernard serait surement, lui aussi, enchanté de cette nouvelle rencontre -mais surtout de ce nouveau compagnon de jeu.

Résultat, voilà les deux jeunes gens de nouveau dans les rues de la ville pour rejoindre leur domaine. Retourner chercher Happy ne fut pas bien long et bien qu'il ait quitté l'animal peut de temps auparavant, celui-ci n'en restait pas moins tout excité de retrouver l'un de ses propriétaire et, qui plus est, de pouvoir sortir à nouveau. Le plus long fut plutôt d'attendre qu'il soit un minimum calmé pour l'emmener avec eux.

- Allons-y !

Eh bien, leur sortie entre cousins aura été bien mouvementée au final. Pourtant c'était bien la dernière chose à laquelle on s'attendait, quand elle commençait par une prière à l'église à la mémoire des défunts. Mais d'un autre côté on pouvait rarement prévoir qu'on allait être la victime d'un tireur à la sauvette – surtout qu'Heileen pouvait lire dans les pensées, certainement pas voir dans le futur –, en fait ils avaient décidé de se rendre au marché sur un coup de tête. Et puis d'abord, rien n'avait obligé le voleur à les viser eux !.... Enfin si, peut-être. Disons que le fait qu'Heileen avait plein de sacs dans les mains et n'avait pas un gabarit bien impressionnant avait dû l'aider à jeter son dévolu sur elle, après tout quand on voyait ses bras et leur épaisseur digne de celle d'un ouvrer de chantier (hahem) on avait du mal à s'imaginer galérer pour lui arracher ses courses des mains... Mais à côté d'elle se trouvait Reita, qui lui n'avait rien d'un gringalet ! Comment ça, le chapardeur s'en fichait puisqu'il se taillait à toute vitesse après son vol et ne s'imaginait pas forcément être poursuivi comme ils l'avaient fait ?... Bon ben prenons les choses dans l'ordre en disant que voler (ou autrement dit destituer volontairement contre le gré d'autrui) ce que d'autres avaient acheté en toute honnêteté n'était pas cool. Imaginez donc que dans le lot, il y ait ce que le volé voulait s'offrir depuis des mois et des mois et que vous, vous venez le lui arracher impitoyablement alors qu'il vit un grand instant de bonheur ? C'est cruel, très cruel.

Enfin bref, ils avaient malgré tout réussi à le rattraper, ce chenapan. Et ils récupérèrent même ce qu'il avait tenté d'embarquer avec lui. Au passage ils en avaient profité pour faire leur sport de la semaine, voyez, parce qu'ils se sont dit qu'ils n'auraient de toute façon aucun mal à l'avoir alors ils en ont profité pour faire un petit jogging, faisant croire ainsi au poursuivi qu'il avait une chance de les semer (sadique hein?).... Ouais non en fait ils avaient galéré à mort. J'ai presque envie de dire qu'il faut prendre cela au pied de la lettre, parce qu'Heileen a vraiment cru qu'elle allait s'évanouir et se cogner violemment la tête sur le dallage tellement ses muscles la tiraient et ses poumons ainsi que sa gorge la brûlaient. Ça lui avait fait un bien fou de lui jeter quelque chose en plein crâne, tiens, c'était un peu comme une petite vengeance personnelle camouflée sous un objectif (celui d'arrêter sa course et, par là même, la leur) (après tout, la fin justifie les moyens).
Cela dit, le voleur ne finit malheureusement pas la journée derrière des barreaux. On devait cela à l'habileté légendaire de la brunette, vous savez, celle qui s'était sentie obligée de la faire tomber sur son cousin alors qu'ils avaient enfin pris l'avantage. Voilà une occasion en or (où un service selon le point de vue....) sur lequel le chapardeur ne cracha pas, puisqu'il prit ses jambes à son cou en vitesse grand V avant qu'ils n'ainet le temps de se relever – sans emmener de butin avec lui pour le coup, sans doute ne voulait-il pas prendre le risque que cela le ralentisse en l'alourdissant.

Ainsi se termina cette péripétie des plus inattendues, avec un rire de Reita qui ne manqua pas de se moquer de la jeune Blauereiss et de son air dépité tandis qu'elle regardait le voleur s'enfuir, la faisant bouder légèrement. Mais quand il lui assura que ce n'était pas grave, elle lui adressa un sourire gêné en se disant que c'était tout lui, au fond elle savait bien qu'il ne lui en voudrait pas mais c'était une question de bonne conscience.
Ils récupérèrent les achats qu'ils avaient laissés derrière eux dans leur course (une chance que personne n'y ait touché tiens), puis Heileen proposa au blond de passer prendre Happy et de se rendre chez elle pour le faire rencontrer Aeron, son husky récemment récupéré errant dans les rues.
Et tout comme elle s'y attendait connaissant les deux chiens, ils s'entendirent bien très rapidement. Le côté foufou du jeune Aeron ne sembla pas troubler le saint-bernard tant que cela, en fait ils jouèrent un long moment pendant lequel l'apprentie vétérinaire ne put s'empêcher de les regarder régulièrement en riant. Quand vint l'heure pour les deux cousins de prendre le goûter, ils eurent la surprise de les voir assoupis près des canapés du salon, collés l'un à l'autre. Avec un sourire tout gai, elle commenta :

-Ils sont adorables ! Je pense que tu pourras amener Happy quand tu voudras, ils s'entendent à merveille.

Par la suite, après qu'ils aient discutés encore une bonne heure et que les deux quadrupèdes se soient réveillés et aient recommencé à jouer, Heileen raccompagna Reita et Happy jusqu'à l'entrée. Ils se saluèrent chaleureusement, puis le blond repartit chez lui et elle-même s'installa confortablement dans le canapé, un air de satisfaction sur le visage. Finalement, tentative de vol ou pas, passer du temps avec Reita était toujours une bonne chose. L'un de ses points forts était de toujours garder le meilleur des choses, alors elle trouvait avoir passé une excellente journée.